• Spécial crise (4)

     

    Quatrième extrait de l’interview d’Emmanuel Todd à l’hebdomadaire Le Point (*)

    (pour mémoire : lien de l’extrait précédent) todd

     

    Le Point : Donc, ce n’est pas la faute des gouvernements, puisqu’on les a poussés à emprunter ?

     

    Emmanuel Todd : Sauf que ce sont leurs choix fiscaux qui les ont conduits à se mettre dans la main des plus riches. Dans « Les dettes légitimes », François Chesnais montre bien comment, en France, les ultrariches ont bénéficié d’une baisse de leurs impôts qui leur permet de prêter à l’Etat les ressources dont il s’est lui-même privé. Sans oublier l’auto-interdiction pour l’Etat de fabriquer de la monnaie, établie par la loi Pompidou dès 1973, mais rendue idéologiquement formidable par le mythe supplémentaire d’une Banque centrale européenne à Francfort, supposée être hors de portée de l’Etat français. Chaque année, les Français se voient ainsi ponctionner, à travers la TVA et les impôts directs, 250 milliards d’euros, dont près de 50 milliards d’intérêts, qui vont à des gens qui ont déjà trop d’argent. Les deux tiers sont d’ailleurs étrangers, parce que la fête est mondiale, les riches Français pouvant en contrepartie se gaver de la soumission des Etats et des peuples. Voilà ce que cache le discours alarmiste et moralisateur sur l’endettement abyssal, la faillite du pays et la nécessité de sauver le triple A. Derrière l’apparente logique libérale du système, l’Etat devient une machine à rançonner les populations au bénéfice des plus riches.

     

    L’impôt est aussi le fondement de la démocratie.

    Quand ils rechignent à s’en acquitter, comme en Grèce, les citoyens sont-ils des victimes ?

     

    Je ne peux que me répéter : on a poussé les Grecs à s’endetter afin de pouvoir mieux les étrangler. Regardez votre téléviseur : sans cesse des publicités nous incitent à emprunter. Les banques, pardon, les riches, aiment prêter. Et les usuriers aiment saisir les biens si l’on ne peut rembourser. Privatiser les biens de l’Etat grec, par exemple.

     

    Ne seriez-vous pas un peu complotiste ? Même si « on » les a poussés, le dealer est-il le seul coupable de la dépendance du drogué ?

     

    Le monde de l’oligarchie est un monde de pouvoir et de complots. En aidant l’Etat grec à trafiquer ses comptes, Goldman Sachs s’est comporté en usurier. Maintenant, ce qu’on appelle « aider » les Grecs, c’est les maintenir en état d’être rançonnés. La crise de la zone euro n’a pas été fondamentalement créée par la nonchalance des débiteurs, mais par l’agressivité des prêteurs.

     

    …/…

    (A suivre)

     

    (*) Le démographe, anthropologue, historien, politologue, Emmanuel Todd, a donné une interview au Point en une douzaine de questions.

    Ci-dessus le quatrième extrait.

    (Le Point du 1er décembre n° 2046 – page 66)

     

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  • Commentaires

    5
    Mercredi 14 Décembre 2011 à 07:03
    New Dawn

    C'est une triste réalité !

    4
    Mardi 13 Décembre 2011 à 18:30
    nanaBreizh

    Il est vraiment passionnant E. Todd, mais quelle tristesse de voir la façon dont on se moque du peuple !

    bonne soirée Ountès

    bisous

    3
    Mardi 13 Décembre 2011 à 18:05
    automne81

    et ombien de temps a supporter encore cette façon d'agir !!!

    bises et bonne soiree guy...

    2
    Mardi 13 Décembre 2011 à 09:56
    Nina Padilha

    Vivement la mort que je me repose...

    1
    Mardi 13 Décembre 2011 à 09:56
    jill-bill.over-blog.

    Com-plexe !!!  Je ne m'intéresse que très peu au monde des politiciens, pourtant c'est un spectacle digne du grand Guignol... pauvre Europe !  Jill

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